stand down, there's a fire in my soul ♚ w/ anthéa

S'éclater les cordes vocales, s'aimer c'est du sport

Jointures des membres qui claquent, les muscles encore congestionnés, la sueur qui perle sur le front puis finalement la fin de la séance. Doit éclaircir sa voix pour discuter avec les autres membres de la salle, vérifie l'heure sur le téléphone. La journée n'a pas été des plus incroyables : il ne s'est rien passé de dingue, pour Anthéa. Elle a vadrouillé entre sa maison et la plage, ramasser des coquillages, s'est occupée de la multitude de plantes présentes dans le cottage mais aussi à l'extérieur.
Impatiente. Très, impatiente. Anthéa s'est décidée à faire de la musculation la majeure partie de la soirée avant de pouvoir enfin rejoindre Ae-ji. Une copine, une bonne copine. Une fille aux allures un peu effrayante de loin, très jolie, au caractère trempé et avec une multitude de qualités qu'elle ne saurait pas vraiment dire là tout de suite tant l'esprit est embué, exténué par les heures passées à courir sur les tapis, les poids au dessus de la tête, les barres de traction ou encore les exercices pour les abdominaux et les cuisses.
Une douche méritée, le sac sur le dos et Anthéa s'est rendue au bar dans lequel Ae-ji doit la rejoindre. Pas particulièrement bien habillée, un simple col roulé sur le buste, un pantalon cargo en guise de tenue de "soirée", pour sortir. Parce qu'Anthéa et la mode ça fait quinze, qu'elle ne s'y intéresse pas vraiment, qu'elle n'a pas non plus le temps en réalité, de pouvoir se poser une petite heure, de se décider que tel ou tel vêtement lui scierait drôlement. Qu'elle n'en a tout simplement pas le luxe, en ce moment.
Bière à la main, discute avec le barman, attend que les secondes et les minutes défilent, arrivée peut-être un poil en avance, préfère s'imprégner de l'ambiance du lieu avant que son amie ne déboule. Et lorsque dans sa chope il ne reste qu'un espèce de fond de mousse, Anthéa tourne la tête, sourit, dépose le coude à même le comptoir pour le moment toujours propre, car début de soirée probablement mais que d'ici quelques heures, il va probablement coller, parce que les gens ne savent pas se retenir, ne savent pas boire.



La commissure élargit le sourire, la blonde commande à son tour un cocktail, deux shots de vodka pour suivre les boissons sucrées et d'une oreille attentive écoute les tracas de la journée d'Ae-ji. Parce qu'Anthéa elle préfère écouter les autres qu'avoir à parler de ses propres problèmes. Que les gens ont tellement de soucis, qu'elle n'a pas à se préoccuper des siens, à trouver des solutions, à se creuser la tête pour elle-même.
Passe un bras à même le biceps, montre à quel point ses muscles sont encore gonflés du sport mais qu'elle est très contente du résultat. Même si demain lors du travail, ça risquait d'être dur de supporter les courbatures.
Puis la voix d'Anthéa se fait couper dans son élan, le regard suit les mouvements fluides d'un jeune homme qui s'immisce, ne semble pas se rendre compte du culot même de ses mots, de sa présence. Alors sans piper mot, Anthéa attrape le cocktail entre ses doigts, laisse un grand sourire déformer son visage, passe une main entre le comptoir et le buste de ce drôle de type et le bouscule violemment. Assez fort pour qu'il bascule, flanche légèrement, pas assez fort pour qu'il s'écrase au sol. Lui jette un regard, dépose le bout des lèvres dans la boisson un poil trop sucrée pour le palais d'Anthéa.



Puis une pression sur l'épaule, force à se retourner, affronter le regard d'un énième type qui n'accepte pas qu'une femme puisse se débrouiller sans lui. Alors Anthéa abaisse le regard sur les doigts qu'elle n'a pas autorisé à effleurer sa peau, même à travers le tissu. Sent la mâchoire se tendre, les paupières qui tressautent légèrement pour ne pas laisser la colère s'évader.
Verre toujours dans la main, nectar qui vient s'écouler dans le gosier, douceur qui apaise l'amertume qui remonte à travers l'œsophage, coule, s'évapore. Puis la pression revient sur l'éclanche, la candeur de la boisson n'est plus, le verre est vide, le type continue à baragouiner. Me pousse pas connasse, tu te prends pour qui, c'est même pas à toi que je voulais parler, dégage, frustrée.



Anthéa regarde son amie, laisse les épaules s'affaisser, le cou légèrement se tendre, le poing droit serré depuis un long moment déjà, le voilà qui s'abat violemment dans la joue du type, au niveau de la pommette, pas sous la mâchoire, pas là où il pourrait tomber dans les vapes. Anthéa souffle enfin, attrape le shot de vodka à côté de son verre vide, pince ses lèvres et l'avale d'une traite.



Regarde son amie, grand sourire aux lèvres, passe son bras autour de ses épaules, essuie l'alcool au coin de ses lèvres qui colle à la peau. Le type qui se relève, surenchérit, même pas mal, j'vais t'en coller une vraie moi. Les insultes qui fusent. Anthéa observe simplement le spectacle, patiente d'une réaction d'Ae-ji.

S'éclater les cordes vocales, s'aimer c'est du sport

Silence dans la tête. Les échos dans la salle. Brouhaha incessant et pourtant, c'est calme autour d'Anthéa. Les phalanges se serrent légèrement, se replient contre les paumes et oscille le regard sur la silhouette plus frêle que la sienne, bien plus frêle. Pourtant tout aussi robuste. Et que même si elle ne l'était pas assez, qu'Anthéa parerait les coups, ne la laisserait pas s'effriter.
Le spectacle se termine pourtant assez vite avec ce type qui tombe au sol, ne résiste pas aux coups d'Ae-ji, comme une danse un peu abrupte, les yeux du ciel à la terre.
Adrénaline qui éveille un peu plus les sens, range la crainte entre les entrailles, asperge la colère et la frustration d'essence jusqu'à qu'une flamme vienne la faire exploser. Grand brasier fulgurant.
Et les mots de ces types glissent doucement dans les oreilles d'Anthéa, comme trop habituée par les types de ce genre, les remarques sur sa personne, qu'en général on ne l'emmerde jamais trop longtemps, la grande blonde baraquée. Ni elle ni ses copines. Mais il faut croire que dès que les rats sont en groupes, ils se pensent plus imposants qu'un colosse.
Anthéa observe le bar un instant, en détaille les décorations plutôt sympas aux premiers abords, la musique indie-rock qui passe et hausse alors les épaules, regarde Ae-ji l'air de rire "C'est pas bien grave, y en a d'autres, des bars."

Alors Anthéa tape doucement l'épaule de sa compagne, un type plus costaud s'approche et elle bouscule son amie. Lui retourne un crochet au niveau de la mâchoire. Mais lui aussi, il est aussi costaud qu'Anthéa, a autant de force et c'est dans la joue qu'elle sent une douleur vive l'étreindre. Pince ses lèvres et recule, se met légèrement à rire, laisse sa langue effacer le sang qui s'est légèrement acculée sur les dents et la lèvre.

Après ça on ira boire un chocolat. On mérite.

Grand sourire à la brune, Anthéa lui tourne à nouveau le dos et vient entourer son col de ses phalanges, le front qui tape violemment dans le nez du type, le fait basculer et genou à même l'estomac, le laisser gire à terre. Devoir rester debout lorsqu'elle sent une autre pression entre les côtes, fléchir légèrement et attrape le type plus menu qu'elle, plus court sur pattes. Le bousculer violemment vers Ae-ji pour qu'elle lui en retourne un au passage. Halète légèrement par la rudesse des coups. L'ardeur des mouvements. La rage dans le ventre.
Esquive, heurte un autre type et doit se pencher lorsque les doigts agrippent la tresse, qu'elle se retourne en trombe et entoure les joues de ce type avec ses phalanges, enfonce les ongles et vient frapper violemment à même le ventre avec le poing libre. Et ça s'accumule toujours plus, bousculades, coups, violence d'un soir, violence de toujours.