table 11 ; ivo & alion

La petite table où tu avais été amené était toute simple. Des assiettes avec des petites questions y étaient installés ; sûrement s’il y avait besoin de briser la glace, ou d’avancer dans la discussion.
Tu ne savais pas trop pourquoi tu avais accepté ; pour te changer les idées, à nouveau, pour arrêter de penser au grand blond que tu avais envie de gifler à chaque fois. Et il était venu à ton concert, tout fier.
Quelle chance qu’il soit grand.
Tu aurais dû te mettre sur un tabouret pour le frapper comme il le méritait.
Mais vous aviez parlé ; rapidement. C’était tendu.
C’était toujours tendu entre vous.
L’annonce d’un événement au sein de la ville pour la saint valentin n’aurait pas pu tomber mieux ; peut-être que, cette fois-ci, tu pourrais vraiment ramener quelqu’un.
Vraiment l’oublier.
T’oublier.
Et l’autre personne arrive finalement à votre table ; tu lui adresses un sourire un peu faible avec un hochement de tête. « Bonjour, Ivo, si je ne me trompe pas ? »
C’est ce que lisait la carte de votre table, en tout cas.
Ton regard se perd quelques secondes sur ses yeux de chaque couleur différente ; sur ses cheveux, qui semblent plus foncé que toi, bien plus roux que toi.

Tu apprécies entendre ton prénom entre ses lèvres ; un petit sourire poli que tu lui accordes, afin de rester cordial.
On ne sait jamais ; ce qui peut se passe ; comment il peut réagir.
Aucun rester prudent – qui sait, peut-être qu’au final, vous vous entendrez bien.
Et il t’aidera à te changer les idées.
Et à la surprise de sa phrase tu ne contiens pas ton corps, le compliment bien trop violent et inattendu – le rouge qui te monte aux joues ; pas de colère ; non, mais d’un étrange sentiment que tu n’avais pas eu depuis bien longtemps.
Tu le fixes, attendant une blague quelconque, peut-être, quelque chose qui montrerait qu’il se fiche de toi – rien.
Rien n’arrive et toi tu es là, les yeux sur lui, le visage rouge ; presque prêt à balbutier mais tu te reprends – tu n’es plus le même, Alion. Tu ne devrais pas te faire décontenancer aussi facilement – et pourtant. « effectivement, on peut dire que je suis un artiste. » ce n’est pas vraiment mentir ; la musique est un art, elle aussi.
« tu es bon pour deviner. » ou il se moquait de toi, probablement ; les affiches dans le métro et sur les bâtiments ne cachait pas réellement ton visage, vraiment.
Mais peu importe si tel était le cas ; tu étais là pour passer du bon temps, et si tu devais jouer l’innocent qui croyait à tout, alors soit.
« et toi, tu travailles dans quoi ? Je ne suis hélas pas aussi bon en musique qu’en divination, monsieur j’ai-des-yeux-sexy. »
Et ils l’étaient.
Sexy.

Il était doué ; ou tu étais facile.
Ou peut-être les deux, aussi.
La séduction n’avait jamais vraiment fait partie de ta vie – ce n’est pas comme si tu passais ton temps à chercher des partenaires, vraiment.
Les choses se faisaient habituellement plus vite, dans un bar bien moins chic que cette salle des fêtes remaniés en speed-dating.
Mais tu lui souris, installant ta tête sur ta paume de main ; montrant l’intérêt que tu as.
(pas vraiment)
(mais tu te prends au jeu)
(pourquoi pas, après tout)
« Avocat est tout aussi sensuel. » insistes-tu à ton tour sur ce mot, y mettant ton accent arabe dessus.
« vous avez de beaux costumes, ça peut toujours servir. » lances-tu avec un clin d’œil ; ne cachant pas ce pour quoi tu es là, après tout.
Et il parle de tes taches de rousseur comme d’un ciel étoilé ; et vraiment, tu te retiens de rire. Sur une fille, ça aurait pu marcher, vraiment ; sur toi, un peu moins.
C’est romantique ; tu ne peux le nier, c’est sûr.
Mais ta peau pâle ne ressemble pas vraiment à un ciel de nuit ; et tu n’es pas certain que tes taches de rousseur soient comme des naines blanches. Ou rouges, du coup.
« Merci, je suis ravi de voir qu’elles te plaisent. » lui souris-tu, prenant en considération la question qui suit de près.
« me demandes-tu sur une relation à court terme ou quelque chose de bien plus profond ? »
Car selon la chose, la réponse changera drastiquement.

Il était doué ; ou tu étais facile.
Tu avais l’impression de n’être qu’une proie ; il avait l’habitude, tu en étais certain.
D’aller les autres
De se complaire dans l’attention
Dans ce qu’il pouvait leur faire ressentir
Tout cela grâce à lui.
Tu hausses un petit peu les épaules, reprenant le liquide entre tes lèvres.
« s’il ne s’agit que d’une étincelle, je dirais la compatibilité. » réponse peut-être trop bateau à son goût ; « Que les sons de violons s’accordent, ensemble. » tu as toujours aimé cette métaphore – pour son côté musical.
« S’il s’agit de plus, alors probablement l’honnêteté. Quitte à blesser l’autre, que chacun sache de quoi il en retourne. » que personne n’ait de secret qui puisse briser les autres – un rien pouvait tout changer.
Tu ne le savais que trop bien.
« pour vous ? qu’en est-il ? » tu n’étais pas forcément curieux ; tu savais très bien que vous n’étiez pas là pour discuter. Ou très peu, en tout cas.
Les discussions ne se feraient probablement pas par les mots (par le corps)
Peut-être que vos violons s’accorderaient mieux dans un autre endroit, aussi (dans les draps)
Mais il ne fallait pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué.
Peut-être que le violon sera trop aigu ; peut-être qu’il ne pourra s’accorder.
Peut-être qu’il restera seul (comme une corde qui claque)

Il avait droit au but ; il ne perdait pas de temps.
Un sourcil relevé, un sourcil au coin des lèvres et tu te demandes de quoi peuvent bien être fait les travaux pratiques, avec lui.
L’impression que tu seras tel un mouchoir ; on utilise et on jette.
(mais tu feras la même chose, de toute façon)
(alors pourquoi pas, après tout)

Ton sourire s’accentue alors qu’il te propose élégamment de passer aux choses sérieuses ; que le jeu se termine, que vous acceptiez d’aller plus loin, enfin.
C’était ce pour quoi vous étiez là tous les deux, après tout ; un jeu du chat et de la souris auquel tu ne t’attendais pas.
(mais ça ne te déplaisait pas)
(d’être la souris)

Alors sa main, tu lui prends ; tu joints tes doigts aux siens, les serrant légèrement ;
« pourquoi partir d’ici quand le room service a eu droit à tant d’éloge ? »
Pourquoi vous embêtes à faire durer le suspense quand tout pouvait se jouer ici, quand la ville avait mis quasiment à disposition tout ce qu’il fallait pour ceux qui souhaitait se connaître un petit peu plus en.. profondeur ?
Tu te lèves, la main toujours dans la sienne.
« Allons-y, alors. »
Et cette fois-ci c’est toi qui mène la danse ; pour une courte durée à peine, juste le temps de demander la clé d’une chambre, juste le temps de prendre l’ascenseur et d’aller jusque dans la chambre.
« une douche ? » toi ou lui ; ensemble, ou pas du tout ?